TUEZ
Il faut toujours tuer. Tout est là ; c’est l’unique réponse. Pour ne pas sentir l’horrible fardeau du Sort qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut tuer sans trêve.
Mais qui ? Des cibles, des masses, des jeunes filles, à votre guise. Mais tuez-les.
Et si quelque fois, sur les marches d’un palais, sur l’herbe verte d’un fossé, dans la solitude morne de votre chambre, vous restés éveillés, l’ivresse déjà brimée ou disparue, demandez au mouvement de l’air, au mouvement du vent sur l’eau, au mouvement des astres dans l’univers, à l’oiseau migrateur ou immobile, au mouvement du temps, à tout ce qui bat, à tout ce qui blêmit, à tout ce qui bouge, à tout ce qui est de silence, à tout ce qui parle en vous, demandez quelle heure il est ; et le vent, la vague, l’étoile, l’oiseau, l’horloge vous répondront : « Il est l’heure de tuer ! Pour n’être pas les victimes martyrisées du Sort, guérissez-vous ; mais tuez sans trêve ceux qui tuent ! Des cibles, des masses, des jeunes filles, à votre guise. »