Berlinoise 1 ; L’avancée

by Florian

 

La berline est grise, plus sombre, indigo, la route qu’elle embrase, constellée de petits caillots qui font un son de pavé au contact des roues. A chaque instant la voiture jaillit du tracé de la route comme un point mobile. La fille à bord à les jambes relevées sur la portière, à la jonction avec le pare-brise.

Le conducteur a les yeux fixés sur son rouge, ses lèvres pulpeuses, vulgaires à travers les miroirs. La voiture avance, s’enfonce. C’est à cette heure un temps gris violacé, crépusculaire. La dernière consomption du jour. Le noir définitif bientôt. Une église emportée. Une église sur roues, des essieux supportent le poids d’un édifice, une religion à l’état embryonnaire.

Elle avance, carrosse, wagon, missile. Elle avance, barque ou torpille. Le conducteur languit de ces lèvres vulgaires. Lèvres de pute, de désespérée, lèvres de botox. Leur légère plissure, leurs méandres intelligents, mauvais, rouges avant cette nuit qui va tomber.