Claire Ceira

la place singulière

par claire le 3 août, 2018

quand le vieil homme aura chanté pour la dernière fois, avec son chapeau
lui qui regardait les jeunes femmes
et pensait pas mal à Dieu
n’a jamais lâché Dieu, comme on parle à un tigre
pour le garder plaqué au sol
pour lui reprocher ses feulements
pour se mirer dans ses yeux d’or fendus
il mourra, et son fils aura tout gardé
même ce qu’il ne comprenait pas.
la voix de bitume et de cendre aura roulé ses derniers échos
il gardera sa place singulière.

celle que donne l’amour
qui vient cueillir un corps ouvert comme une fleur et le poser sur la table
debout, toujours debout
qui vient saisir une voix à la limite d’un bois
qui touche comme une peau le cuir d’un accoudoir.

c’est la place qu’on voudrait toujours et qu’on n’a presque jamais
alors on se retire dans l’ombre
comme le vieil homme si prêt à la mort
on quitte le pays, on va vivre ailleurs
là où les gens n’ont pas
cette place singulière
où ils sont eux-mêmes,
on renonce à ne plus être un étranger.

2 comments

Il y a des portraits urbains qui subsistent malgré le temps. On dirait parfois qu’on voit de l’ancien avec du neuf.

by Florian on 21 août 2018 at 22 h 54 min. #

J’essaie de saisir vraiment ce que tu as voulu me dire, cher Florian – sibylle.

by claire on 24 août 2018 at 12 h 22 min. #

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